Le deuil

le deuilUn texte de Fernande Sorel

Aujourd’hui j’ai appris que tu es mort, que tu as quitté ton corps. Quel choc, que de peine et de tristesse je ressens. J’ai l’impression de ne plus être là, d’avoir perdu la moitié de moi tellement je me sens comme une plaie géante qui se promène. Je ne suis plus moi, je suis émotions, tristesse, douleurs; je voudrais me coucher et pleurer, pleurer toutes ces larmes qui envahissent mon cœur. Je voudrais que cessent mes larmes et cette douleur, fuir, ne plus sentir cet état de tristesse qui m’habite jour et nuit. Je voudrais ne plus voir personne, m’enfermer quelque temps, c’est ce que j’ai fait.

Je me suis enfermée dans ma peine, j’y ai vécu un temps, j’ai fait semblant de me lever, de travailler, de sourire, j’étais là physiquement, mais mon cœur était avec toi, je t’avais suivi dans la mort. J’avais l’impression que personne ne comprenait ma peine, qu’il n’y avait que moi qui souffrait autant. Pouvait-on me blâmer? J’avais 23 ans, je me sentais vide de toi, de nous, mais j’étais encore plus vide que je ne le croyais. J’étais vide de moi, mais à ce moment-là je ne le voyais pas. J’avais tellement de difficulté à accepter ta mort, que je me suis fait des scénarios dans ma tête. Tu étais quelque part et nos parents ne voulaient plus qu’on s’aime. Quelle idée n’est-ce pas ? Je t’aimais tellement que je ne voyais pas comment je pourrais vivre sans toi. En vérité, au fil des ans j’ai compris que je ne m’aimais pas assez et comme je t’aimais toi, j’avais mis tout mon amour en toi. Qui allais-je aimer à présent que tu n’étais plus là? Certainement pas moi. Je me jugeais trop sévèrement pour cela. Alors je me suis retrouvée face à ce vide intérieur qui vivait en moi, j’étais remplie d’émotions, de colère, de peur, de rejet et je ne savais quoi en faire. Puis on t’a mis en terre. Dieu que j’ai eu de la difficulté à te laisser aller. J’ai cru que l’on ne se reverrait pas.

Finalement, je crois que c’était cette partie de moi que j’enterrais car je t’aimais toi et pas moi. J’avais oublié qu’il y a une autre vie dans l’au-delà et que je te retrouverais. J’ai erré pendant des mois entre mon travail, ma chambre et quoi d’autre encore. J’ai déménagé, arrêté de fumer. On me disait : tu vas voir ça passera. On aurait dû me dire : tu es en train d’apprendre à vivre une expérience terrestre qui te servira, mais à ce moment-la, les gens près de moi ne le savaient pas, ne s’en souvenaient pas. Je ne sais pas pourquoi j’ai été si dure avec moi et n’ai pas consulté plutôt, restant prisonnière de toutes mes émotions.

J’ai finalement fait une thérapie. J’ai continué à survivre le jour, à penser et à pleurer la nuit. Ce n’était pas une vie. J’en suis venue ‘à me sentir tellement découragée que j’ai osé faire une demande aux êtres invisibles. Je lisais et entendais toutes sortes de choses sur les guides, les êtres de lumière mais n’y croyais pas trop. J’ai quand même fait une demande, une nuit que je ne pouvais pas dormir. J’ai dit : si vous existez vraiment là-haut, aidez-moi, venez m’accompagner pour la nuit, j’en peux plus! Et là une forme lumineuse m’est apparue. J’ai eu peur, j’ai crié, puis en une fraction de seconde elle est disparue. J’ai dit non! Ne partez pas! Restez avec moi! Et je me suis sentie apaisée, rassurée, calmée, et j’ai bien dormi, comme si je sentais cette forme lumineuse m’envelopper dans ses bras rassurants.

Alors j’ai commencé à croire, à lire, à recevoir des informations de différentes façons et maintenant je sais que je te reverrai, que tout ne s’arrête pas avec la mort, que c’est seulement un passage. Ma peine s’est transformée. La laisser aller m’auras pris plusieurs années, elle partait et revenait avec une chanson, un souvenir, une photo de toi, un homme avec une moustache. Je me sentais attirée vers des hommes à moustache sans trop m’en rendre compte. J’ai essayé de t’oublier dans d’autres bras, d’autres activités qui me rappelaient toujours quelque chose de toi.

J’avais voulu tasser ce souvenir dans quelque recoin de ma mémoire, mais n’y suis jamais arrivé. J’ai compris par contre que j’avais des souvenirs avec toi qui ne s’effaceront jamais et que c’était un apprentissage que j’avais besoin pour comprendre certaines choses sur moi. J’ai rencontré une médium qui parle avec les morts et j’ai osé essayer pour voir, par curiosité. Elle m’a demandé si je voulais te parler. J’ai dit oui et ça m’a libéré d’une partie de ma peine. L’espace de quelques jours je t’ai retrouvé, je sentais que tu étais là près de moi, je n’avais aucun doute. Celui qu’elle me décrivait c’était bien toi et de toute façon je le sentais à l’intérieur de moi.

Je me suis libérée d’une partie de ma peine, je me suis sentie plus légère, je me suis réconciliée avec Dieu, avec la vie. Je croyais que c’était Lui qui avait voulu me faire souffrir et ne pouvais le concevoir. C’était simplement une expérience que je devais vivre pour apprendre certaines leçons terrestres, comme tous les êtres humains, à différents niveaux.

Je réapprends à ouvrir mon cœur à l’amour, mon cœur que j’avais fermé à double tour. Enfin, après cette expérience j’ai senti que je pouvais tourner la page, puisque j’avais fait la paix avec toi, avec moi. Tu es reparti vers la lumière et je me suis sentie soulagée. Je garde en moi les souvenirs de cette expérience avec toi qui m’as appris à m’aimer un peu plus, à ne pas tout donner sans rien garder pour moi.

Évidemment, ce n’est pas terminé avec toi, puisque pour moi, apprendre à m’aimer, c’est le travail de toute une vie. J’ai réappris à faire confiance à la vie, aux expériences que je vis, car c’est à travers ces dernières que je découvre vraiment l’être extraordinaire que je suis. J’ai compris que tout ce que je vis, me sert à apprendre, que parfois, sur le coup, je n’en saisis pas toute l’importance, mais qu’à un moment ou à un autre, les expériences vécues me servent, qu’il y a toujours un apprentissage derrière ce que je vis.

Le deuil a traversé ma vie à trois reprises, mais j’ai su, malgré toute la peine que je sentais, que ça passerait, que ça se calmerait encore, tout comme avec toi. Le deuil est un passage tout comme la naissance, c’est simplement nous qui parfois le rendons plus pénible à traverser. J’ai aussi appris qu’à ma mort je retrouverai, sur un autre plan de conscience, tous ceux que j’ai aimés. Ça me rassure, maintenant que je sais que j’ai encore pleins de choses à apprendre et à enseigner: Entre autres choses, que la mort n’est qu’un passage et que la vie n’est qu’ une suite d’expériences pour apprendre.

Fernande,  pour la découvrir cliquez ici

Laisser un commentaire



SUIVEZ-NOUS SUR
LES RÉSEAUX SOCIAUX :


X